svea, elle se regarde dans le miroir, fronce les sourcils et détourne la tête. elle n'aime pas son reflet. pas quand elle est seule dans cet appartement si petit mais trop grand pour elle. pas quand ils ne sont pas là pour lui dire qu'elle est belle. elle se démaquille sans se regarder davantage et se fait un chignon puis elle sort de la salle de bain. cette nuit, elle ne travaille pas et c'est bien dommage, qu'elle se dit. elle préfère passer les soirées où c'est le cas avec nadejda et eli mais, malheureusement, ils ne sont pas là. ils lui ont dit qu'ils ne pouvaient pas. pour nad, elle comprend, svea. elle a sa famille, tout ça. pour eli, c'est différent. il n'a pas d'explication. il n'a rien. peut-être qu'il l'évite. peut-être qu'il ne la veut plus. peut-être qu'il va la laisser pour une autre. pour la jolie fleur. ça la rend malade, la suédoise. c'est après avoir passé une main rageuse sur son visage qu'elle s'installe sur le canapé, allume ce truc pourri qui lui sert de télévision et se met à zapper les chaînes. évidemment, il n'y a rien de bien intéressant. elle soupire bruyamment. cette soirée va être longue. trop longue. et, svea, elle sait que dormir, ça va être difficile. elle a prit l'habitude de dormir avec quelqu'un. d'avoir quelqu'un avec elle, pas loin. la blonde termine par éteindre la télé et prend son portable pour mettre de la musique. ce portable, elle a pu se l'acheter grâce à ses strip-teases. grâce à ces hommes et ces femmes en manque de sexe qui en veulent toujours un peu plus de ses formes. un jour, qu'elle se dit, un jour, elle ira avec eux dans leurs vieilles voitures dégueulasses. elle ira avec eux et ils auront ce qu'ils veulent. elle, elle aura autant d'argent que possible. elle, elle pourra acheter des cadeaux aux amours de sa vie et, pourquoi pas, aider son taré de frère ainsi que sa rageuse de sœur. elle n'a pas peur, svea. elle pourrait le faire sans réfléchir. si ce n'est pas le cas aujourd'hui, c'est simplement parce qu'elle tient à son trouple. qu'elle considère qu'elle n'a pas le droit d'aller voir ailleurs. il y a cette chanson qui commence à se faire entendre dans l'appartement et elle se lève pour danser. elle a besoin de se libérer. de vivre comme elle l'entend. alors, elle danse à n'en plus pouvoir marcher. elle chante à s'en brûler la gorge. la chanson n'est pas forte, ceci dit, alors elle entend ce bruit à la porte. juste un petit bruit, rien de plus, rien de moins. tant qu'on ne toque, elle ne viendra pas ouvrir. on termine par le faire, comme si la personne avait lu dans ses pensées, et elle soupire en baissant le son. ses pas la mènent jusqu'à la porte d'entrée. elle ouvre. elle lève les yeux au ciel. dans quelle merde tu t'es encore fourré, ren ? qu'elle demande à son frère, presque agacée. elle se décale de l'encadrement pour le laisser passer. lorsqu'il arrive à sa hauteur, svea se rapproche et l'attrape par le bras pour l'arrêter. tu restes pas dormir cette fois. son ton est autoritaire. elle essaye de paraître sûre d'elle quand elle l'affirme à sören. évidemment qu'il va rester. il reste toujours. elle le lâche aussitôt, referme la porte derrière elle et se réinstalle sur le canapé tout en le regardant. rassure-moi, sören. cette fois, on veut pas te tuer, pas vrai ? on ne sait jamais avec l'aîné igelstörm.

il fait chier, sören, mais elle l'aime. svea, elle se demande bien ce qu'elle deviendrait sans lui et ses expressions faciales stupides. lui et sa voix agaçante. lui et ses remarques absurdes. lui et ses conneries qui en venaient même à dicter la vie de la blonde le court temps qu'il passait dans son appartement miteux. rien, probablement. elle ne serait rien sans lui. parce qu'au fond, même si elle sait que nadejda et eli ne partiront pas, lui, il ne peut juste pas partir. c'est son frère. son sang. son âme sœur en un sens. elle le déteste d'arriver à pas d'heures chez elle. elle le déteste de s'incruster dès que ça l'arrange. elle le déteste, juste, autant qu'elle peut l'aimer. c'est ça qui est compliqué chez les igelstörm. ils se détestent un jour et, le jour d'après, ils s'aiment à en mourir. sören, il ne montre pas quand il aime mais elle sait, la suédoise. elle sait qu'il l'aime à sa manière et qu'il n'arrive pas à le montrer comme les autres pourraient le faire. ça ne lui pose pas de problèmes. elle l'accepte comme il est. quand elle entend frapper, elle ne se dit pas que cela pourrait être lui alors que ça aurait dû lui sauter aux yeux. eli et nadejda ne viennent pas ce soir et on toque chez elle. svea ouvre. il y a ses yeux qui se lèvent au ciel comme d'habitude. parce que, ouais, il le fait souvent ce con. elle lui pose toujours la même question. faut toujours poser cette question à sören mais, au fond, elle n'a pas envie de savoir ce qu'il fait dehors. qui il fréquente. quel boulot illégal il fait pour survivre. il y a son visage qui s'illumine, à lui. elle a envie de le frapper. maaais non, rien d'grave, t'inquiètes soeurette, qu'il lui dit. mon œil qu'elle aurait voulu lui répondre. cependant, elle se contente de s'écart et il passe comme s'il était arrivé dans sa demeure. la blonde, ça l'agace encore un peu plus mais elle a l'habitude. avant qu'il n'aille plus loin, elle lui attrape le bras lui affirmant que, ce soir, il n'allait pas rester dormir. ses mots sont inutiles parce qu'il n'écoute pas. parce qu'elle même, elle sait qu'il restera. pourtant elle s'efforce de prendre un air autoritaire pour qu'il entend son affirmation. elle termine par le lâcher et, au final, c'est comme si ses paroles étaient passées dans l'oreille d'un sourd. sören s'installe sur le canapé et elle le rejoint. ses yeux ne quittent pas son visage. svea, elle cherche un signe qui laisserait transparaître ce qui lui arrive. ce qu'il a pu faire. elle lui demande, la suédoise, si on ne veut pas le tuer. elle a peur. c'est vrai. j'risque rien, svea. arrête de paniquer pour un rien. détends toi deux secondes, r'garde, j'vais bien. pour rien ? elle a réellement envie de lui éclater la tête contre la table basse pendant une demi seconde. elle terminera par le tuer, un jour où elle ne pourra pas se contrôler. mais ouais, il va bien. il n'y a pas de signe de combat sur sa peau et ça rassure la suédoise. eux deux, ils sont toujours bons pour s'attirer des ennuis avec leur impulsivité. elle ramasse ses jambes contre sa poitrine et les entourent de ses bras. tu t'ennuyais, toute seule, hein? avoues, t'es contente que je sois là. essaies pas de mentir. sa main vient ébouriffer ses cheveux et elle grogne avant de la retirer de son crâne. tu sers vraiment à rien, qu'elle dit rageusement. elle retire l'élastique qui retenait son chignon et laisse tomber ses cheveux en cascade sur ses épaules. j'sens que j'vais pas m'ennuyer avec toi, sale con. elle balance sa tête en arrière. un sourire termine par s'étendre sur son visage. svea relève la tête pour regarder une nouvelle fois son frère. m'dis pas que t'as personne avec qui passer la soirée. genre, une pute bon marché ou, tu sais, un de tes plans cul qui te coûte pas un rond, taquine-t-elle. elle frappe doucement son bras avec son poing. t'as soif ? j'ai d'la bière et peut-être une bouteille de vodka entamée dans le frigo. il allait rester de toute manière alors bon autant en profiter, pas vrai ? elle attend qu'il lui réponde parce qu'elle lui propose, svea, mais elle n'ira pas les chercher.

quand elle dit qu'il sert à rien, sören, elle ment. il sert à quelque chose. il sert à la tenir en vie quand ça va pas même s'il ne s'en rend pas compte. il sert à la faire se sentir aimée même s'il s'y prend comme un manche à balais. mais si, regardes, j'viens illuminer ta soirée. son arrogance, elle l'énerve, svea. elle voudrait le frapper jusqu'au sang pour qu'il arrête d'être un si gros con. mais, au fond, s'il arrête de l'être : ce n'est plus sören. si ce n'est plus sören alors c'est tellement moins drôle. alors elle oublie sa main qui est venue ébouriffer ses cheveux. elle le frappe avant de lui demander s'il n'a pas quelqu'un d'autre avec qui passer la nuit. c'est vrai, ça. pourquoi il est avec alors qu'il pourrait se glisser entre les reins d'une jolie demoiselle ou d'une prostituée laide comme jamais - ce n'est pas réellement son problème à svea, les goûts de son frère. j'préfère passer la soirée avec toi plutôt qu'une pute, tu peux te sentir flattée. il lui rend son coup et elle grimace de douleur. il y va toujours bien plus fort qu'elle, cet enfoiré. et, en plus, il sourit. puis c'est au tour de svea de sourire aussi. oui, elle est plutôt flattée. pour le montrer, elle lui dit qu'il y a des bières de la vodka dans le frigo - ce qui veut dire dans son langage qu'elle l'invite à rester. comme un automatisme, sören se lève. aaah, vodka! tu vois, quand j'te dis que tu vaux mieux qu'une pute. et, la suédoise, elle rit. elle rit de la connerie de son frère. elle rit parce qu'il est là, avec elle. au fond, elle est heureuse que ce soit le cas, ce soir. svea l'attend et elle sait. elle sait qu'il va pas se contenter de chercher la bouteille alors elle lève les yeux au ciel. c'est un vrai gamin, sören. si tu fais le bordel dans la cuisine, j'te jure que j'te fous à la porte, qu'elle gueule à travers le petit appartement. au moins, elle est sûre qu'il va l'entendre - même s'il va, très certainement, en avoir rien à faire. il termine par revenir avec la bouteille et s'affale à côté de svea avant de boire une gorgée et de la lui tendre. elle lui fait un signe de la tête pour le remercier et prend une aussi longue gorgée. elle en a besoin, la blonde. terriblement besoin. ça lui brûle la gorge mais elle aime ça. elle aime trop ça, même. son regard se perd devant elle, sur le mur blanc. et toi, svea? parle moi d'ta vie amoureuse tiens, ça fera un sujet de conversation autre que mes putes. elle hausse les épaules. elle sait pas si elle doit lui en vouloir parce qu'elle lui a déjà dit ou si elle doit s'en vouloir à elle-même parce qu'elle ne lui a jamais dit. elle ne se rappelle plus vraiment, svea. ce soir, j'suis seule, qu'elle dit simplement en reprendre une gorgée. elle tend la vodka à son frère. d'habitude, quand j'travaille pas, ils sont là tous les deux. ça peut le perturber, sören, de savoir qu'elle fréquente deux personnes à la fois. ou pas du tout. eli et nadejda. j'sais plus si j't'en ai déjà parlé.