ses yeux se posent par intermittence sur le cadran de sa montre en cuir et les jeunes qui se la touchent en face de lui.
il n'a jamais aimé les gens, les jeunes en particulier. tous cons. tous fous.
ils sont irrécupérables.
des jeunes sans visage, ils sont tous pareils, la même gueule, les même fringues et les même expressions à la con.
la jeunesse est une maladie incurable et la plupart pourront crever, et voir leur vie réduite en cendre avant même d'avoir crapoté leurs rêves. son métier ne sert à rien avec ces gens-là. il ne peut même pas s'amuser un peu avec leur esprit, ils n'en ont pas. pas de pensées, pas d'envies, juste l'impression qu'ils sont invincibles, tout puissant. aucun but dans la vie, ils veulent juste vivre avant que la faucheuse ne vienne les chercher. pathétique. ils écoutent du rap en attendant que les paroles dictent leur vie. fumer, tiser, baiser.

c'est peut-être pour cette raison qu'ils sont là, panneaux en mains, roulé coincé entre les lèvres. cigarette sur cigarette, va savoir ce que contiennent ces feuilles roulées.
il est pas là pour ça lui, juste pour observer, parce qu'il sait que beaucoup ici ont des problèmes, il fait un peu son marché.
en retrait, loin des petits cons avec leur voix qui déraille et leur haleine qui pue l'alcool et la beuh.
il se lève, regarde sa montre une fois de plus et marche vers eux. en dady cool.
le brouaha s'élève, le bruit résonne dans sa tête déjà embrumé.

énervé par tous ces cons présents, l'envie de faire chier un peu son monde, il marche droit devant lui et fait un croche pied à une personne qu'il croise au hasard. un sourire grossier au coin des lèvres, l'air innocent, l'air de rien, l'air d'un gosse qui cherche un peu la merde. un grand gamin, un rire coincé dans sa gorge, les abdominaux contractés pour ne pas exploser.

kasper, il est sorti comme ça. elle lui pompait encore l'air. elle lui volait tout ce putain d'oxygène. il ne voulait qu'une chose : le retrouver. mais aujourd'hui, c'est pas un jour ordinaire. la libération du cannabis. on dirait qu'on libère un prisonnier célèbre, un criminel recherché par toute la planète. non, c'est juste une putain d'herbe. pas celle de ton jardin mais quand même. les rues sont bondées. des gens partout. des filles, des garçons, des jeunes, des vieux. c'est la fête au village à Amsterdam. kasper, il se faufile entre les groupes. il les regarde, les survole de ses prunelles. la plupart ont le joint à la bouche et le verre à la main, comme si de rien n'était. il pourrait aussi sortir le sien, s'en faire, rouler les trucs précieusement mais il a la flemme. puis il préfère les endroits calmes pour ça, les nuits spéciales, sous les étoiles. après un tag, c'est généralement ce qu'il fait. un joint au clair de lune, quand le monde est endormi mais pas lui. quand il reste seul, dans la nuit noire. là, c'est pas forcément son type de lieu préféré. puis il doit faire bonne figure aussi. yuna le pourrirait. madame veut une famille respectable. respectable mon cul. d'ailleurs, elle le suit. il entend ses cris, ses 'kasper' perdus dans la foule. il ne compte pas s'arrêter. enfin, au début, il ne pensait pas à ça. puis il ne l'entend plus. mais yuna, c'est pas le style à lâcher l'affaire. il se retourne et la voit, par terre. elle a les mains dans des débris de verre, d'une bouteille, la bière d'un con. alors, malgré qu'il la déteste plus qu'il ne l'aime, il fait demi-tour. yuna, ça va ? elle lui répond que oui. elle ajoute que c'est "ce grand con là-bas qui lui a fait un croche-pied." kasper, il n'écoute pas sa raison. seulement son instinct. il se lève. elle le rappelle, lui dit n'y vas pas mais c'est inefficace. déjà à l'assaut le gosse. la moindre des choses c'est de dire pardon quand on fait tomber quelqu'un, espèce de con.

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