j'ai demandé à la lune.

panne d'inspiration, totale.
ton esprit est à sec. aucun moyen d'aligner plus d'deux mots sans froncer les sourcils. ça craint.
tu t'arraches les ch'veux et t'enchaines les roulées. rien à faire.

deux heures plus tard, t'es toujours là, à te demander c'que t'as bien pu faire pour être aussi vide. une véritable larve..
tu soupirs fort et te lèves, accédé.

puis il fait trop chaud dans cette chambre. t'ouvres violemment la fenêtre. putain ! t'en as ras l'cul ! pourquoi c'est si compliqué d'exister ?! hein, pourquoi t'es même pas foutu d'faire la seule chose pas trop sale que tu as la possibilité de faire ?!

quelques minutes après t'es dehors, une nouvelle clopinette au bec, ta besace toujours en place. tu passes une main sur ton front mouillé. d'la vie..
t'en peux plus de cette vie en carton, t'en peux plus de cette ville en papier crépon.
alors tu herres, as usual.
elles sont belles les rues, celles que tu connais mieux que personnes.

tu t'y perds, paradoxalement.
par choix, sûrement.
ton corps sais pas trop où il traîne, tes jambes suivent machinalement le mouvement.
mais ta caboche, elle connaît l'chemin.

cette porte rouge, tu la connais :
sortie des artistes. tu souris.
tu sais pas ce que tu fais ici..
lui, il sait, il saura, il sait toujours.
tu sors ton cellulaire. tu pianotes rapidement puis tu le ranges.

tu sais cette petite boule s'former dans ton ventre vide.
une véritable muse..
il te "guérira", c'est sur.
rien qu'son minois et tu seras pimpant.

Les mains touchent, les regards transpercent.
Tu sens les sourires, les billets glissés au creux de tes cuisses à défaut des lèvres, pourtant si envieuses.
Ce soir, non.
Ce soir à part si l'âme abîmée te donne trop envie, ça sera non.
Ce soir ari tu danses, tu donnes envie. C'est tout. Pas plus.
La chanson se termine et tes hanches se figent. Un verre au bar.
Il te faut une cigarette.
Alors tu enfiles ton trench usé. Tu soupires mais tu souris.
Le portable vibre dans ta poche mais tu ne le sens pas.
La porte en fer s'ouvre et le vent est doux ce soir, comme s'il t'invitait à la danse.
Et puis, le regard s'éclaire.
Il est venu, ton petit poète.
Il n'a pas le droit d'être ici, même pas majeur. Mais dans sa tête, y'a des comètes. T'as toujours aimé ça chez lui. Les quelques mots que TU as su lui grapiller et les sourires, plus nombreux.
Tu t'avances et tu déposes un baiser sur sa joue. Volé comme une caresse dans la brise. Tu sais qu'il s'en fout. Que ça veut rien dire. Que tes baisers appartiennent au monde, à lui.

"Ça me fait plaisir de te voir."

Tu allumes la cigarette, recrache la fumée qui part danser avec la lune avant de disparaître.
Jago A l'air même plus pâle que ta fumée, ça t'inquiète. Tu ressens sa frustration jusque dans tes veines.

"T'es venu courir après les étoiles? Elles ont l'air un peu voilées dans tes yeux ce soir."

la porte s'ouvre difficilement, ce grincement fait se tordre encore plus ton estomac vide.
ariel.. tu sens ton pieds battre contre le béton, de l'impatience ? probablement. une légère crainte qu'il soit trop occupé à l'intérieur ? peut-être.

tu reconnais instantanément ce corps, stellaire.
tes yeux ne peuvent déjà plus le lâcher.
il est beau ariel, tu aimes le voir comme ça.
il vient de danser, ça se sent.
y'a son souffle qui peine légèrement à s'réguler puis,
y'a son corps encore tremblant de toute cette ovation qu'a dû lui faire sa foule.
il est doué ariel, tu le sais.
t'as déjà été le voir une ou deux fois, avec cette fausse carte pourrie.
mais tu veux pas lui causer d'ennuis alors, tu passes le voir ici.

il avance vers toi.
tu sens ton souffle.
il devient court. court.
ses lèvres sages s'approchent de ta peau, vierge.
puis là; big bang.
un contact, anodin.
quelques secondes.
pourtant t'as vu l'monde.
t'as tout revu en quelques instants. de l'apparition de tes ancêtres à la guerre de feu et de sang qui vous perdra, tous.
mais tu t'en fous du malheur.

dyastole. systole.
contre ton coeur, imbécile.
tu secoues légèrement la tête. reviens sur terre; gamin.

tu voudrais lui répondre, lui dire qu'toi aussi t'es heureux de le voir , toujours.
mais t'arrives juste à articuler :

bah..merci

puis t'as ce sourire niais, marmot perdu.
t'examine le moindre de ses gestes. tout est bon à prendre.
il as l'habitude d'être regarder ari.
tu t'demandes ce que ça lui fait.
tout ça.
les baisers, les caresses.
les mains, les bouches qui s'approprient son corps.
puis les yeux, tous sur lui.
tu sais pas si ça te plairait à toi, l'timide.

tu l'envies.
ariel est un artiste, un vrai.
tu baisses les yeux.
pourquoi pas toi, hein ?
pourquoi tu es pas foutu de finir ce que tu commences ?

la voix du danseur te sort de tes ténèbres.
tu fixes à nouveau ton regard dans le sien.
impénétrable, le garçon.
tu sais jamais à quoi il pense, ariel.
puis ça t'intrigue.
alors t'hésites un instant avant de faire raisonner ta voix.
mi-homme, mi-enfant.
même toi t'es pas fini..

dis, à quoi tu penses présentement ari ?

Jago est comme les lumières de la ville
des fois il est éteint
mais la plupart du temps il brille très fort, et surtout la nuit.
Le bâton incandescent rejoint ta bouche et ton rire flirte avec la fumée
ta main attrape la sienne
le fait un peu tourner, danse silencieuse. Jago est beau sous la lune, jago est beau sous les étoiles. Le gamin perdu a tellement de choses à trouver, des choses plus grandes que toi.

« J'pense à toi et à ton sourire. »

le tien rayonne dans la nuit et le cœur bat sous ton manteau
il fait encore froid, le bout de tes doigts est gelé
mais quand ils se glissent contre sa nuque, ils se réchauffent.

« Et aux étoiles. Tu les vois ? »

Tu lèves les yeux un instant
les nuages passent à toute vitesse, assez pour voir les astres, assez pour observer
même si les lumières de la ville les voilent un peu
elles sont là, tes étoiles.

« Un jour, on devrait aller les regarder, loin des immeubles. »

tu as pas l'habitude qu'on t'touche, qu'on t'manipule.
alors tu sursautes légèrement, puis tu rougis lorsque l'beau danseur il prend ta main.
ton coeur se serre. à chaque fois qu'ariel bouge, il se serre.
tu t'demandes toujours ce qu'il va faire, l'artiste.
et puis il s'met à rire, et t'fais tourner.
une fois, les lumières d'la ville s'transforme en traînées d'couleurs.
deux fois, tu sens cette odeur, celle qui est propre à ariel et à son talent.
trois fois, t'as l'impression de voler, plus différence entre ciel et terre, nuit et jour, éros et thanatos.

puis il s'arrête ari' aussi soudainement qu'il a commencé.
tu es un petit peu perdu, un petit peu troublé et tu t'attrapes au second bras de la muse.
ton coeur bat si fort contre tes côtes que ça raisonne jusque dans ton crâne.
mais ariel il te laisse pas souffler, il fait pas de pause.
il évoque ton sourire et dans ta tête ça sonne comme une invocation alors, il apparaît sur ton visage, large.
puis ariel aussi il sourit. tu resterais bien des heures à le regarder, son rictus de miel. mais déjà il te tire contre lui.
Il glisse ses mains froides dans ta nuque et tu peux pas t'empêcher de frisonner.
pourtant c'est étrangement agréable.
ce contact doux te donnerai bien des ailes mais, l'froid d'ses doigts contre cette zone érogène fixe tes pieds au sol comme pour te rappeler qu'il t'enverra jamais au dessus des étoiles le bel ariel.
non, vous vous contentez d'les regarder avec envie.

d'ailleurs il fini par les mentionner, comme toujours. et tu souris, plus fort alors que tes yeux suivent les siens jusqu'aux nébuleuses au dessus de vous. elles sont bien trop caché par la pollution lumineuse d'cette ville. tu fais la moue.
puis hasardeusement tu lances.

qu'as tu prévu de faire ces trois prochaines heures ?

tu sens ton visage rougir, ça doit être le froid. enfin, c'est s'qu'on dit.

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j'ai demandé à la lune.

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