Elle ne s’est jamais préparée aussi tôt pour une soirée et pour cause, celle-ci commence vachement tôt : 20 heures pétantes. Preston, ami qui fête ses vingt-deux ans aujourd’hui, a décidé de faire dans l’originalité. Elle n’en sait pas plus, lui et ses coups tordus. Pourquoi elle y va déjà ? Ah oui, elle aime les coups tordus. Puis, c’est son ami, elle se doit d’être présente maintenant qu’elle a accepté. Au fond, elle ne s’en plaint pas vraiment. Zahara, elle refuse rarement une sortie.
Elle arrive chez le garçon ou plutôt, chez ses parents qui sont absents. Thornton Park, clairement pas le quartier le plus charmant de la ville mais elle s’en fou. A vrai dire, il est toujours mieux que le sien. Il parait plus… habitable disons. Elle connait les lieux et rentre sans frapper. De toute façon, personne ne l’entendrait. Dieu, il y a déjà foule là-dedans ! Zahara, polie, trouve le courage de chercher son pote dans tout ce bordel. C’est la moindre des choses, histoire de lui souhaiter un joyeux anniversaire. Elle l’aperçoit dans la cuisine, sortant un pack de bières du frigo. « Hé, bouge pas. T’es soudainement plus intéressant. » Elle lui décroche un sourire avant de s’ouvrir une bière. Mh, bien fraiche ! « Joyeux anniversaire, p’tit vieux. » Zahara, elle se plait à rappeler à ses proches, plus vieux qu’elle, qu’ils sont justement plus vieux qu’elle. Elle a de la chance, elle ne connait pas grand monde plus jeune qu’elle. Une étreinte plus tard, ils se retrouvent dans le salon avec tous les invités. Monsieur Preston veut parler.
Il annonce son jeu, un jeu débile mais Zahara, elle kiffe déjà. Son défi : un resto basket. Son partenaire : un certain Ace que Preston ne tarde pas à lui montrer du doigt. Toujours sa bière à la main, elle se dirige vers l’inconnu. Plutôt grand, svelte, cheveux clair et beaux yeux. Mh, elle aurait pu tomber sur pire. « Zahara. » Elle fait simple. Son prénom suffit au jeune homme pour savoir qu’ils vont passer une bonne partie de la soirée ensemble. Elle lui adresse un sourire, tout simple tout beau.

inhale. exhale. la cancéreuse se consume entre ses lèvres, ace en recrache lentement la fumée âcre par sa fenêtre ouverte sur le monde. à l’extérieur de sa chambre, c’est l’bordel. ça bouge dans tous les sens, ça crie, ça gueule. son seul moment de solitude probablement, entre ces quatre murs, loin de tout ça. ace, il en profite, accoudé contre le mur. le visage de sa sœur lui traverse l’esprit l’espace d’un instant. son cœur se serre légèrement, il se demande ce qu’elle peut bien faire. il voudrait lui envoyer un texto, rien qu’un, mais il ne le fait pas. ne bouge pas un muscle à part ceux de ses doigts pour faire tomber la cendre dans le cendrier.  il l’écrase, s’apprête à sortir, chassant toutes pensées noires de son cerveau. bouge ton cul ace, on s’barre. sourire en coin, ace enfile sa veste en jean un peu trop grande pour son corps fin, et suit ses potes sur le bitume de vancouver. ils se font remarquer dans les rues, c’est devenu presque habituel. peu importait. ace, il s’pose jamais vraiment de questions. - la maison de leur pote est déjà bondée, il n’a pas fait les choses à moitié pour son vingt-deuxième anniversaire.  ace, il tape la discute à quelques têtes connues et puis on annonce des défis. ça le fait sourire. il se retrouve en duo avec un prénom qui lui est inconnu, mais très vite, il peut mettre un nom dessus. il la détaille discrètement. ou pas. il ne se rend plus véritablement compte. elle est jolie, avec ses longues mèches brunes retombant sur ses épaules fines. les yeux aussi bleus que les siens. ace ne se déperd pas de son sourire en coin alors même qu’elle se présente simplement.  zahara. ça sonne comme un doux mystère. il est curieux de savoir qui elle est, elle.  il hoche la tête machinalement. ace – j’espère que t’aimes courir. il hausse un sourcil amusé, continuant de plonger ses yeux dans les siens, sans gêne. les mains enfoncées dans les poches, ace lui adresse un léger signe de tête. allez viens sahara. il la cherche un peu. déjà. voir comment elle réagit à l’entente de son nom intentionnellement écorché.  

Il la regarde, l’observe, totalement dépourvu de discrétion. Pourtant, aucune gêne ne se fait ressentir, elle ne saurait expliquer pourquoi. Elle s’en moque, à vrai dire. Elle ne cherche même pas à l’expliquer, pas même l’espace d’un instant. Il est beau, Ace alors elle-même, elle le découvre, une découverte agréable. Si les amis de Preston étaient tous comme ça, ça se saurait. Il a ce sourire en coin sur les lèvres qui lui donne un aspect mystérieux, intriguant. Du moins, c’est comme ça que Zahara le perçoit. « ace – j’espère que t’aimes courir. » Elle-même, elle sourit à l’écoute de cette remarque. En effet, ça pourrait être utile. Zahara, elle pourrait très lui répondre qu’elle est du genre sportive, qu’elle fait même partie de l’équipe de volleyball de son université mais à quoi bon ? Après tout, Ace s’en rendrait compte de lui-même, bien assez tôt. Elle garde le silence. Les pupilles du jeune homme ne quittent pas les siennes, elle soutient l’échange. « allez viens sahara. » Elle le prend bien, elle sourit même. Quelque chose lui dit que c’est volontaire. Là encore, il n’y a pas d’explication. Pas besoin. Elle ne se dégonfle pas la brunette, elle répond, surenchérie. « Je te suis, Ade. » Facile.
Ils quittent la maison. Zahara, évidemment, elle a gardé sa bière. Hors de question de l’abandonner avant de l’avoir fini. Elle boit une gorgée. Les premiers pas se font dans le silence. Néanmoins, ce n’est pas désagréable. « T’es plutôt italien, japonais, chinois ? » Elle s’arrête là, la liste peut être longue. Ils n’allaient quand même pas choisir un restaurant au hasard ou le premier devant lequel ils passeraient. Quitte à aller au restaurant, autant prendre quelque chose qu’ils apprécient.