GHOSTS AND MEMORIES

Izzy tangue, bascule et puis s’écroule sur l’asphalte qui lui mord la peau dans un grognement mauvais. Il frappe d’un poing rageur la planche qui le fuit déjà (encore).
C’est la cinquième fois ce matin qu’il s’effondre, c’est ridicule.
Il fait encore nuit, le jour peine à se lever sur la ville qui dort encore, il fait froid. Le sol est humide.Les roues du skate adhèrent un peu trop. Ou pas assez. Izzy lui n’adhère à rien, Izzy s’effondre au lieu de s’envoler dans cette heure grise qu’il choisit pour son silence.
Sa peau le brûle là où elle est éraflée (c’est-à-dire presque partout maintenant).
Son cœur bat dans sa poitrine comme une kalachnikov au Pakistan à chaque fois que son visage s’écrase contre le ventre noir de la route. Izzy roule comme on pleure, avec beaucoup de mélancolie. Izzy rêve à des jours où la planche lui accrochait des ailes au dos, à des sourires qui lui vrillaient les tripes, aux cris de la foule, aux regards. Izzy rêve de sentir le vent soulever sa casquette alors qu’il tournoie sur lui-même, haut, toujours plus haut, d’un côté à l’autre de la rampe, toujours plus vite, toujours plus fort.
Izzy a peur, il s’effondre encore.
Toujours cette peur, celle de la chute. Et puis cette jambe trop faible qui le clou au sol comme un boulet.
Izzy se relève encore une fois, grimace, et court en direction de la planche qui s’enfuit au bout de la rue, comme si elle aussi avait compris que son maître avait perdu. Tout perdu. Tout ? Non il reste la vie.
Tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir. Tant qu’il y a de l’espoir, Izzy survit.
Drôle de monde, drôle de cerveau embrumé sous les vapeurs de joints et les souvenirs de gloire passée.
Il avance avec peine cette fois-ci, en grimaçant parce que vraiment, sa jambe le tue.  Ou bien ce qu’il en reste de sensible.
Il finit par intercepter la fuyarde et s’effondre dessus avec un grognement satisfait, asseyant son cul de jeans râpé sur les grips usés d’une planche qui aurait pu trôner  dans l’appartement d’un sportif friqué, ou d’un connaisseur avisé. Il se dit que c’est du gâchis, mais hausse les épaules et crache un gros mollar gluant sur le bitume.
Il finit par sortir une cigarette tordue d’un vieux paquet de lucky strike écrasé dans la poche de son jeans, l’allume et tire une grande bouffée. Puis une seconde. Et une troisième.
C’est à cet instant qu’il entend les pas, des pas irréguliers sur le sol mouillé, des pas qui claquent comme des chaussures haut-perchée pour blondasse écervelée.
Il a rien contre les blondasses écervelée Izzy, elles sont pas plus pitoyable que les autres, mais plus atypique. Il pose ses yeux sur la rue avec les pas qui se rapprochent, enfonçant sa capuche par-dessus sa casquette, enfouissant son visage dans l’ombre de ses vêtement ; il la regarde arriver, la blondasse.
Et quand elle finit par entrer dans le halo des réverbères, le cœur d’Izzy s’arrête de battre, parce que la blondasse elle est loin d’être écervelée. Parce que c’est un fantôme qui s’avance devant lui dans la rue, un fantôme sortie d’un passé qu’il aurait préféré laisser là où il était. Un passé auquel il pense souvent, sans pouvoir s’en détacher. Sans non plus en pleurer. Un fantôme qu’il n’a jamais vraiment su oublier.
Leonor Gallagher, belle, encore plus belle.
Réelle. Réelle ?
Et la voix d’Izzy s’enfouit tout au fond de sa gorge alors qu’il n’ose pas s’avancer pour vérifier.

Et puis quoi de toute façon Iz ? Et si c’était bien elle ? Tu ferais quoi hein, tu lui dirais quoi ? Nan crois-moi ça vaut mieux de rester là, ça vaut mieux pour toi.

C’aurait été plus facile s’il ne s’était pas vautré en arrière, dévoilant son visage avec l’envol traître de sa casquette suivit de près par la retraite honteuse de sa complice capuche.

Izzy s’arrête de respirer. Boum boum. Son cœur bat très (trop) fort et ça lui tape dans les tympans, dans les yeux, dans le ventre. Boum boum.
Et elle est là, elle le regarde. Avec ces grands yeux plins d’étoiles un peu folles et ses cheveux qui volent dans son dos  comme un voile. Il a envie de les toucher Iz, les cheveux de soie de Leonor. Mais il reste là, pétrifié. Parce que Leonor est là devant lui. Vivante. Vibrante. Réelle.
Parce qu’elle s’est arrêtée et qu’elle a parlé, et dans la tête d’Izzy ça file très (trop) vite.
Leonor qui rit. Leonor qui pleure. Leonor qui dance.
Ses mains, ses yeux, ses seins.
Le gout de ses lèvres, la forme de ses fesses. Tout.
Leonor Gallagher, en chair et en os. Juste là.
Izzy détourne le regard, fuit, monte les yeux au ciel, les redescend sur ses pieds, suis la courbe des réverbère pour se poser à nouveau sur le visage trop familier.
Quelque part il aurait presque préféré qu’elle disparaisse pendant ces instants de fuite, qu’elle se volatilise comme les effets de sa cigarette. Comme un rêve. Un cauchemar.
Est-ce que c’est un rêve ou un cauchemar ?
Elle est là, elle le regarde. Il n’y croit pas. La fixe avec cette mâchoire qui pend bêtement comme s’il avait perdu toute faculté de penser. De parler. D’être (et il l’a presque perdu, la faculté d’être Izzy quand les grands yeux vert d'eau se sont posé sur lui).

"iz."  Sa voix est rauque, absente, étrange. Elle ne dit rien d’autre.
Elle n’ajoute rien, deux lettres, une syllabe, la sienne.

Et ces deux lettres ont l’effet d’un électrochoc sur le cœur et l’esprit d’Izzy qui vagabonde avec ses souvenirs, il revient, là, devant elle. Il avance une main hésitante vers son visage, il voudrait la toucher, cette peau si douce, il a besoin de sentir la chaleur de Leo, la vie qui bat dans ses veines. Mais à mi-course il se ravise et laisse retomber son bras ballant dans le vide, comme un idiot.
Il entend les larmes de l’Autre. Ses cris. Marla...
Et ça le brûle en dedans parce que c’est une tornade de feu à l’intérieur, une guerre terrible qui fait rage entre son cœur amoureux, et sa conscience fidèle, entre ce qu’il voudrait faire et ce qu’il doit faire. Va faire.
Alors il baisse les yeux et souris en coin.
« Leonor. Ca fait longtemps »
Des mots vides de sens, des mots bateau pour un garçon stupide. De toute façon elle est trop bien pour lui. De toute façon elle l’aura oublié. De toute façon c’est lui qui l’a quitté. De toute façon il est heureux avec ses fantômes. De toute façon. De toute façon…
Il relève les yeux pour les plonger dans l’océan bleu-vert de la jolie blonde. Il brûle, ses yeux brûlent, brûlent si fort qu’il a peur de la voir s’enflammer sous la passion qui le dévore. La lutte.
« T’as pas changé. » Des mots qui en cachent d'autres.

T'es toujours aussi jolie leo, avec tes airs de princesse sauvage, et si tu savais l'effet que ça me fait de te voir là devant moi t'aurais peur j'en suis sur, parce que j'ai beau luter, tu me fais toujours le même effet. Tu me fais brûler, fondre et mourir à la fois, et je sais plus quoi faire pour survivre moi, je sais plus quoi fair pour exister. Quand t'es là. Quand t'es pas là. Je sais plus rien du tout Leo, c'est ça l'effet qu't'as sur moi. Tu me fait même oublier Marla.

Il ne le dira pas.

Spoiler:

« tu m’as manqué » des mots qui claquent comme une gifle sur la joue d’Izzy, une claque qui a le gout salé des larmes de Marla. Une claque de nuit d’orage.
Toi aussi tu m’as manqué Leo, si tu savais comme tu m’as manqué, si tu savais à quel point mon cœur bat dans ma poitrine à cet instant je me demande  pourquoi mon thorax n’a pas encore explosé sous la pression. Parce que je pense à toi tous les jours, malgré les années. Mais je pense à Elle aussi. Parce que dans ma vie tu es indissociable de Marla. Parce que je n’ai pas le droit de t’aimer Leo, malgré mon cœur qui se consume, parce que je n’ai plus le droit de t’aimer après ce qu’on lui a fait. Ce que je lui ai fait.
Les mots vibrent derrière ses yeux-miroir, avec presque autant de joie que de souffrance, avec cette déchirure en dedans.
Est-ce qu’elle sait ? Est-ce que Leonor voit les tornades qu’elle déclenche ?
Izzy baisse les yeux, évitant son regard.
Il fourre ses mains dans ses poches en courbant l’échine, balançant d’un pied à l’autre avec cet air d’enfant punis. Il retient ses mains qui hurlent pour se poser sur ses joues à elle, il retient son cœur qui craque et son âme qui claque. Il retient tout ça Izzy, derrière un drôle de sourire un peu amère, un sourire qui en dit trop, ou bien pas assez. Un sourire d’Izzy.
Qu’est ce qu’elle est jolie avec son petit visage de poupée.
« Désolé » grande première, Izzy s’excuse. Izzy qui avait juré ne jamais s’excuser.  Izzy le fier qui bat en retraite, la queue entre les jambes. Elle est trop … Trop.

Il aurait du lui dire quelque chose ce soir-là, juste quelque chose, il le sait bien. Mais qu’y avait-il à dire ? Elle est morte ? Elle s’est tuée ? Comment aurait-il pu lui dire ça ? Comment pourrait-on dire ça ? Marla est morte à cause de leur amour. C’est tout ce qui comptait. Compte. Marla est morte alors il n’a plus le droit d’aimer Leo, c’est la vie c’est comme ça. Elle est cruelle la vie mais on fait avec, c’est le karma.
Alors il est parti Iz, sans rien dire, sans un regard, sans un adieu, parce qu’il n’y avait rien à dire, puis surtout parce que ç’aurait été trop difficile de partir s’il avait vu les larmes dans ses yeux à elle.  Parce qu’izzy était lâche. Est lâche.

Mais comment lui expliquer toutes ces choses, quels mots pourrait-il utiliser pour qu’elle comprenne ? Il ne sait pas Izzy, alors il se tait et regarde au loin. Il fuit parce que c’est ce qu’il sait faire de mieux Izzy, fuir et ne pas regarder.
Il attrape sa planche dans sa main et en gratte le rebord, puis pose ses yeux dans les siens à elle « tu cherches quoi Leonor ? »Et ses mots durs lui écorchent les lèvres, la langue, les dents.
Il voudrait lui crier son amour, mais seuls ses yeux brûlant le dévoilent. Elle est belle, elle est tellement là, tellement… vivante.

Et dans ses yeux à elle Izzy voit la tempête, alors il frôle du bout des doigts sa main à elle et aussitôt regrette.
Putain Iz tu fais quoi là ? C’était pas prévu ça !
Leonor et ses tornade, toujours plus vite, toujours plus fort.
Il en est fou Iz, il ne sait pas comment arrêter, parce qu'il y a des choses qu'on explique pas, des choses qu'on ne comprend pas et que ne répondent à aucune logique. Des choses comme ça.

Spoiler:

Quand elle lève ses jolis yeux verts vers Izzy, le cœur du jeune homme manque deux ou trois battement, parce que quand leurs regards se croisent, Izzy oublie de respirer. Il y a tellement de choses dans les yeux de Leo, tellement de choses. Des océans, des mondes, des rêves, des rires, des larmes. Des souvenirs aussi. Et là tout de suite il y a un genre de … chagrin ?
Izzy fronce les sourcils, pourquoi Leo serait-elle triste ? Ne devrait-elle pas le haïr ? Ce serait tellement plus simple. Tout serait tellement plus facile avec de la colère et quelques insultes.
Pourtant c’est cet espèce de silence hésitant qui coupe les phrases, ces regards en biais, avec des yeux pleins de questions, puis aussi toute sorte d’autres choses, des choses qu’il ne faut pas dire. Des souvenirs. C’est une malédiction les souvenirs, parce que quoi que vous fassiez ils ne vous laisseront jamais en paix. Se souvenir c’est ne pas oublier, mais oublier c’est se libérer.
Izzy il n’a jamais su se libérer des choses delà vie. Encore moins des choses du cœur. Et Léonor c’est son cœur, sa vie, ses souvenirs et sa folie.
Et Izzy se demande ce que serait sa vie s’il ne l’avait jamais croisée, la jolie petite poupée blonde.
Il serait probablement toujours à Venice. Avec Marla. Sa planche et ses cachets tous les mois.
Est-ce que ce serait vraiment mieux ? Il ne sait pas. Izzy ne sait pas grand-chose, il hésite, il fait partie de ceux qui ne sont jamais sures de rien.
C’est pitoyable.

"Qu’est-ce que tu veux que j'te dise, iz ? regarde-moi. je sais pas. je sais plus, depuis que t'es parti. Pourquoi t'es là ?"
Les mots de Leo résonnent dans l’air froid du matin, et izzy se perd dans les grands yeux verts. Il fronce les sourcils pour comprendre, parce que leo à l’air tellement… changée. Leo à l’air perdue. Et izzy ne lui a jamais vu cet air-là. Et puis son visage se rapproche et izzy en a des vertiges, il peut sentir l’odeur de son shampoing qui flotte comme un voile autour de la blonde, il peut voir les frissons sur sa peut qui se hérisse très légèrement par endroit, et ça lui fait tout bizarre dans le ventre, à Izzy de la voir comme ça. Il laisse ses yeux dériver sur ses traits à elle, ses yeux de chats, ses cils trop longs, ses sourcils, sa temps, descend le long de la joue pour s’accrocher à son menton, puis remonter, tout doucement jusqu’à ses lèvres entrouvertes. Ces lèvres qu’il connait trop et dont il pourrait presque encore sentir la pression contre les siennes.

Alors il ne réfléchit pas Izzy, il ne pense plus à rien et sans vraiment comprendre ce que son corps s’apprête à faire, il attrape la joue de Leonor dans sa mains qu’il serre un peu trop fort avant de poser tout doucement ses lèvres sur les siennes. Un baiser léger, comme les ailes d’un papillon, presque un rêve.
Un baiser du cœur, que la raison n’a pas réussi à intercepter, un baiser salé par les larmes qui ont trop coulées sans jamais voir le jour, un baiser qui dit à la fois je t’aime et adieux, un baiser qu’il ne comprend pas lui-même.
Et avant qu’il ne réalise ce qu’il vient de faire, il repousse violemment la jeune femme sans toutefois parvenir à lâcher son épaule qu’il serre toujours plus fort, de peur peut-être de la voir disparaître.

« j’suis là pour rien léo. Pour rien. J’suis plus rien tu sais ? Te ferais mieux de t’en aller.
Je fais n’importe quoi. Oubli tout ça, pardon Leo, j’suis fatigué. »
Il est perdu Izz, et dans ça tête le monde bourdonne de plus en plus fort.
Putain mais qu’est-ce que je fou là ?

Spoiler:

l'aube timide assombrit ses traits. son souffle, leur souffle, colorent l'air frais de matinée d'une brume irrégulière, malmenée. deux corps errants dans la nuit finie, par hasard, ou par destin. il fallait qu'ils se retrouvent un jour. il le fallait. ils n'ont jamais pu s'oublier. alors c'était comme une évidence, ça devait arriver. dans ces circonstances, dans ces conditions. lui et elle, isolés de tous. âmes perdues et envolées dans la nuit. paroles qui ont du mal à sortir, les mots qui s'entrechoquent, qui cogitent, qui tuent. retrouvailles salées. parce que c'était obligé.
le regard sombre et profond d'iz qui se plonge dans le sien, jusqu'à en perdre pied. des yeux qui bouillonnent, qui s'enflamment. des yeux parfaits. il a beau avoir changé, avoir grandi, mûrit, périt une ou deux fois au passage, il reste toujours le même. leo le retrouve, après tout le temps passé, et si elle peut affirmer une chose, c'est qu'au fond, il ne peut pas avoir tant changé. mais pour le reste, petite princesse est torturée, l'esprit embrouillé, l'âme en furie, qui cherche à s'en aller de tous les côtés. elle sait plus quoi penser, que faire passer en premier.
ils se rapprochent, un peu trop peut-être. mais c'est leo qui a avancé, la peur aux tripes, les pas hésitants, peu sûrs d'eux. et il la regarde. cette vision qui contourne les lignes de son visage, qui se balade un instant. elle garde ses lèvres entrouvertes, comme pour être sûre de continuer à respirer. parce qu'avec lui si près, elle manque d'air, se sent emportée.
puis ses lèvres contre les siennes. c'est comme un électrochoc. ça bouscule encore plus violemment tout le bordel qui se trouve à l'intérieur. ses sentiments intensifiés, ses émotions à fleur de peau. tout. retour brusque à des années antérieures, à un passé plus que fragilisé. un passé pourtant jamais oublié, tant il l'a marqué. baiser rapide, mais qui signifie une infinité. elle s'y attendait pas, personne s'y attendait. ses lèvres légèrement négligées que la blonde connaît si bien. celles qu'elle a tant caressé du bout des doigts. celles qui ont le goût de la condamnation, du feu brûlant de la tentation. c'est une part de passion qui renaît un faible instant, pour mourir aussitôt. il réalise un peu, elle, pas totalement non plus. tout est confus. et elle sent une poussée sur sa poitrine, un rejet. comme un bout de papier qu'on aurait chiffonné. la main cependant toujours présente sur son épaule, sur laquelle elle pose désormais son regard. les larmes lui montent presque aux yeux, et elle sait pas pourquoi. mais c'est une gallagher, alors elle apprend à cacher. "j'suis là pour rien leo. pour rien. j'suis plus rien tu sais ? tu ferais mieux de t'en aller. je fais n'importe quoi. oublie tout ça, pardon leo, j'suis fatigué." le cœur qui bat à la chamade, qui saute un battement, rattrape le suivant. leo qui comprend plus rien, qui mélange de trop ses pensées, elles qui deviennent insensées. incapable de répondre, ou de sortir de ses lèvres encore brusquées ne serait-ce qu'un mot compréhensible.
alors elle tourne ses talons mouillées par le sol imparfait, tout en lançant ce qui semble être un dernier regard à iz. beau iz. iz qui lui a trop manqué. un pas. deux pas. trois, et ça s'arrête là. il est derrière elle, et elle ne veut pas continuer à avancer. elle refuse, leo. elle a pas envie, vraiment pas. marche arrière, la belle se retourne, les yeux en furie, les sens en alerte. "et puis merde, iz." avancée rapide. nouveau face à face, et leo, elle agrippe le visage du brun de ses deux mains, pour l'embrasser une nouvelle fois. un peu plus long, un peu plus de passion. parce qu'elle en a envie, même si ça lui est interdit.
leo, bordel, ce que t'es conne. de ta faute, il s'encrera d'avantage dans ton esprit. d'une encre indélébile, quelque chose que tu pourras jamais oublier, jamais effacer. malgré tous ces souvenirs, les bons, comme les mauvais. tu finiras par le regretter.

Spoiler:

Elle s’en va. Elle s’en va sans rien dire Leon, et Izzy la regarde avec tellement de mots bloqués dans sa gorge,  sans pouvoir briser le silence.
Et puis de toute façon à quoi bon ? Il était stupide, il avait fait quelque chose de vraiment irréfléchi, il avait bousillé le travail de quatre années appliquées à disparaitre en l’espace de quelques seconde. Quelques secondes à s’attarder tout doucement sur les lèvres douces de Leonor.
Il la regarde s’éloigner, centimètres après centimètres,  pour ce qui lui semble durer une éternité. Il évalue les différentes options, les mots qu’il pourrait dire, pour la retenir ou au contraire la faire fuir. Mais il ne dit rien, il la regarde lâchement s’éloigner.
C’est mieux pour tout le monde de toute façon.
Et puis les mots de la blonde le frappe comme une gifle, "et puis merde, iz."
Il n’a pas le temps de comprendre ce qu’il lui arrive, il sent les petites mains un peu froides sur ses joues, et puis ses lèvres à elle contre les siennes à lui, avec toute la chaleur, la passion des souvenirs. Il sent son odeur, tout partout jusque dans son ventre ou s’envolent les papillons, et son cœur qui lui défonce le thorax, il la sent là, tellement… vivante.
Alors il ne peut pas s’empêcher Izz, et même s’il sait très bien qu’il devrait la jeter contre le mur et s’enfuir en courant avant de finir en miettes, il peut pas s’empêcher d’attraper sa taille, de la serrer fort contre lui, comme s’il pouvait empêcher le temps de passer, et de répondre à son baiser avec toute la rage qui bouillonne en lui.
Il ne peut pas non plus s’empêcher d’emmêler ses mains dans ses cheveux et de constater avec plaisir leur douceur humide, il ne peut plus vraiment raisonner quoi que ce soit, il abandonne lâchement izzy, laissant la sauvagerie passée envahir ses pensées.

Il ne peut pas non plus empêcher la première larme de couler. Ni la seconde. Ni toutes les autres qui les succèdent en venant s’échouer entre leurs joues rougies, dégoulinant jusque dans sa bouche en y laissant le gout amère des regrets.
Et le visage de Marla revient, vient se superposer à celui de Leonor. Il entend les cris, les larmes et plus que tout le hurlement des sirènes qui résonnent dans la nuit, les flashs des gyrophares et l’odeur âcre du feu et du sang.
Et cette fois il pleure vraiment Izzy, pour la première fois depuis quatre ans. Pour la première fois depuis cette fameuse nuit. Il pleure sans pouvoir contrôler les larmes qui franchissent la frontière de ses paupières avec une facilité déconcertante. Il serre très fort Leo contre lui, tellement fort qu’il l’étoufferait presque, tellement fort qu’il pourrait la briser. Puis il réalise, baisses les yeux, rencontre les siens. Tout doucement il desserre son étreinte avant d’enfouir son visage dans sa main, enfonçant profondément son regard vide dans le bitume humide.
Toujours dans le plus grand silence il repousse la jolie blonde, avec beaucoup plus de douceur cette fois-ci, il la repousse loin de lui, et s’effondre assis sur le sol, l’air hagard. Il fouille dans sa poche, en tire une cigarette et l’allume d’une main tremblante. Une bouffée. Deux bouffées. Trois bouffées.
« On doit pas faire ça Leo. C’est pas juste, mais je peux pas. »
Il fixe toujours obstinément le goudron luisant sans oser lever ses yeux vers elle, il a bien trop peur de ce qu’il pourrait y voir.

En cet instant, Izzy voudrait bien être un petit garçon. Un tout petit garçon rêveur et sans soucis, qui ne connait rien au cœur et ses raisons. En cet instant Izzy aimerait bien échapper à sa vie, parce que tout serait tellement plus facile.
Ce serait tellement plus facile d’oublier, de tout effacer. Les sentiments, les souvenirs et les regrets.
« Pardon Leo. J’sais plus ce que je fais. »

Spoiler:

elle retrouve la chaleur de ses paumes, la douceur de ses lèvres. il la prend par la taille, la tient de toutes ses forces, comme s'il ne voulait jamais la laisser partir. elle sent une main se balader dans sa cascade blonde emmêlée, éraflant quelques mèches d'or. et le cœur de leo, il bat plus que jamais, se serre d'avantage, manque d'exploser. il est griffé par le passé qui les unit, coloré de milliers de souvenirs interdits. et ses yeux, pupilles d'émeraude, brillent dans la matin, par les larmes, mais aussi par les infinités d'étincelles qui remontent à la surface, celles du feu d'artifice qui se passe à l'intérieur alors qu'elle est en train de l'embrasser de manière passionnée. ils se laissent aller un moment, laissent s'écouler quelques secondes éternisées, en même temps que remonte le départ amer des années passées. leur visage s'humidifient, les larmes coulent des yeux d'iz, s'ajoutant au baiser prohibé, y apportant le goût de leur jeunesse envolée. parce qu'il était le tout premier.
et il la serre fort, si fort, qu'elle se sent sienne un instant. si fort, qu'elle ne veut plus s'en détacher. si fort, qu'elle a l'impression de faire à nouveau partie de lui. si fort, que ça semble durer une éternité. puis il éloigne son visage légèrement pour y venir déposer son regard désarmé par les sanglots affolés, ruisselant sur sa peau. leo n'arrive pas, elle n'arrive plus. une larme qui coule de ses yeux immaculés, puis plusieurs qui s’ensuivent. ses lèvres mordues pour essayer de retenir, de créer un barrage face au torrent incessant. elle n'ose pas le regarder de nouveau. alors leo vise au loin, tente de calmer ses larmes qui ne cessent de couler. elle voit iz dans le flou déboussolé, avachi, tremblant presque. il créé un halo brumeux avec la cigarette qu'il vient d'allumer. et son visage mouillé se brouille avec la fumée. immobile, hésitant. leo croise les bras, tente de réchauffer un peu ses bras meurtris par le froid du matin levant. elle réalise seulement, après s'être libérée de ses mains, ce qu'elle venait de faire. elle avait pas le droit, et elle l'a fait. et elle commence déjà à regretter.
"on doit pas faire ça leo. c'est pas juste, mais je peux pas." le pire dans tout ça, c'est qu'ils en ont envie. elle le sent dans son baiser spontané, dans le sien avec lequel elle a surenchérit. elle sait aussi qu'il a raison, qu'ils ne peuvent pas. "pardon leo. je sais plus ce que je fais." t'inquiète iz, t'es pas tout seul. hein, leo ? tu joues avec le feu ma pauvre. mais tu vas brûler tes ailes, brûler les siennes avec. et tu pourras plus t'envoler. tu seras clouée, enfermée en cage avec lui, chacun dans un coin attaché, avec interdiction de s'approcher de trop près. dommage, leo, fallait partir avant. t'as loupé ta chance, et tu t'enfonces, toujours plus profond, dans les méandres de la passion réfutée.
mais elle veut savoir. elle a besoin de savoir, leo. elle sait, elle veut juste en être sûre, elle veut entendre ces mots meurtris et déchirant sortir de ses entrailles. la blonde se baisse un peu, assez pour enfin rencontrer encore une fois son visage de face. même s'il tourne la tête, baisse le regard. même s'il tire toujours sur la cancéreuse allumée, en tentant de se calmer. la blonde range une mèche de cheveux sur le côté. elle sèche quelques larmes audacieuses sur ses joues gonflées. puis elle tente à nouveau de le regarder. "pourquoi, iz ? tu m'as laissée. et pendant tout ce temps, j'ai pas arrêté d'y penser." ce flou l'a hanté pendant des années. des milliers de questions se bousculent dans son esprit torturé. "dis-moi ce que j'ai fait." elle a besoin, leo, de l'entendre dire. qu'il lui dise qu'il a voulu l'oublier. qu'il la frappe, qu'il la bouscule, qu'il lui fasse ranger ses idées. qu'il l'accuse, qu'il la déteste. parce que leo sait, au plus profond d'elle, qu'elle avait causé la mort de l'innocente qui ne demandait qu'à être aimée. marla, qu'elle s'appelait.

Spoiler:

Le visage de Leonor percent comme une chandelle entre les larmes qui ne peuvent plus s’arrêter, et Izzy détourne vivement la tête parce qu’in homme ne doit pas pleurer. Ne peut pas pleurer. Parce que c’est ridicule tout ça. Parce que c’est ridicule ces larmes, et puis son cœur qui tambourine toujours plus fort dans sa poitrine.
Mais ce qui est le plus ridicule dans tout ça, c’est qu’Izzy ne sait même plus pourquoi il pleur. Pour qui ? Pleure-t-il pour Marla et son sourire qui s’est envolée contre un mur de brique rouge ? Pour Leonor et ses grands yeux couleurs printemps qui le regarde avec ce mélange de tellement de choses qu’Izzy n’arrive pas à déchiffrer ? Ou serait-ce pour lui, ces larmes, pour lui et son cœur en miette, lui et ses deux amour qui le fuient et lui échappent ? Lui et son fantôme, un fantôme qui l’a éloigné de la femme qu’il aurait certainement pu aimer pour toute une vie. Peut-être même deux.
Mais est ce qu’on peut toujours aimer quand le temps passe ?
Est-ce qu’on peut toujours aimer quand le temps tue ?

Elle pleure aussi Leo, en silence comme une jolie fille dans un film français. Ou italien. Des larmes rondes sur des joues roses. Et quand elle pleurer comme ça, Izzy se dit qu’elle est jeune, et belle. Elle ressemble à un ange Leo, un ange tombé du ciel. Pourtant son coeur tiraille quand leurs regards se croisent, s’accrochent et s’entremêlent. C’est douloureux d’aimer. C’est douloureux quand on ne sait pas le faire sans se blesser.
"pourquoi, iz ? tu m'as laissée. et pendant tout ce temps, j'ai pas arrêté d'y penser."
Elle a le droit de savoir. Izzy le sait. Il aurait bien aimé pouvoir lui dire, lui expliquer. Lui dire qu’elle n’y est pour rien, qu’elle n’a rien fait de mal et qu’il est monstrueux de lui reprocher d’exister, pourtant c’est bien la seule chose qu’il pourrait lui rapprocher Izzy, d’exister. Parce que le simple fait de son existence à elle a anéantis la sienne, et c’est comme s’il pouvait encore sentir le regard de son fantôme dans son dos quand elle jubile, parce que marla a trouvé le seul moyen de l’éloigner de celle qui l’a envoûté, Izzy. Marla est morte et sa liberté à lui est morte avec elle.
"dis-moi ce que j'ai fait."
Si seulement je pouvais.
Si seulement je pouvais poser des mots Leo. Des mots qui ne laissent pas de trace sur tes ailes que j’aimerais recoudre dans la nuit avant que tu ne finisse bouffée par la vie.
Pourtant il ne dit rien Izzy, il se contente d’avaler la fumée grise qu’il recrache du bout des lèvres, comme à contrecœur.

« t’as rien fait leo. Rien. Mais t’existe et ça suffit.»
Ça suffit à quoi ?
A t’aimer.
A t’embrasser.
A te haïr un peu aussi.
Ça suffit à briser mon cœur comme des milliers de petits miroirs qui me jettent toujours ton reflet au visage.
Ça suffit à me maudire leo.
Ça a suffit à la tuer.
Mais ces mot-là ne se disent pas, alors izzy baise les yeux et enfonce son regards dans l’autre-monde, là où personne ne peut le rejoindre, tout au fond du gouffre béant qui gît à l’intérieur.
Depuis quatre ans Izzy vit dans la nuit, dans un monde gris et sans couleurs, malgré le soleil qui chauffe ses phalanges en été.
Et la seule étincelle qu’il a pu trouver, il vient de la réduire au silence en détournant les yeux de celle qui le fait encore rêver.
« Je t’aimais Leonor si tu savais. Si tu savais comme je t’aimais. »
Je t’aimerais toujours au fond de moi, parce que chaque fois que je pense à toi je sent mon cœur bondir, parce que lorsque j’entends ton nom je ne peut pas m'empercher de me retourner à la recherche de ton regard. Parce que chaque fois qu’une blonde marche dans la rue je suis tenté de la suivre pour te voir tourner au coin de la rue avec tes airs de princesse sauvage. De princesse un peu cabossée.
Mais il n’ajoute rien izzy, il fixe obstinément le bitume avec sur les lèvres le gout des siennes, avec son parfum à elle dans le coup, et ça lui donne envie de crever izzy. De pleurer. Puis surtout de l’aimer. Parce que c’est tout ce qu’il peut faire, aimer. Tout ce qu’il peut rester.

Spoiler:

son regard noisette dévié, qui ne veut pas regarder la réalité. ils veulent tirer un trait sur le passé, pour pouvoir tout recommencer. faire de leur vie quelque chose de plus joli, quelque chose qui ne tue pas sans arrêt. quelque chose de pure et simple, quand on est pas obligé de retenir ses larmes, de sentir l'amertume de toutes ses années à patienter en travers d'une gorge trop nouée. mais l'impossible les rattrape. il barre leur route, leur brouille encore plus leurs pensées. un fantôme inconnu pour leo, connu pour iz, s'y mêle, joue un rôle trop important dans le présent dont il ne fait plus parti. parce que la mort a le dessus sur tout. même si au fond, ils veulent juste s'échapper des sentiments en bordel et d'une vie trop compliquée.
chaque seconde de silence supplémentaire est une nouvelle épreuve, quelque chose qui semble tuer, trop dur à surmonter. il tire deux, trois fois sans contrôle sur sa cigarette meurtrie. "t'as rien fait leo. rien. mais t'existes et ça suffit." ça suffit. elle est la cause, l'élément qui a tout perturbé, tout chamboulé, il y a de ça des années. leo, elle peut voir la tristesse et le feu dans les yeux baissés du brun. parce qu'elle le connait encore trop bien. "je t'aimais leonor, si tu savais. si tu savais comme je t'aimais." ça tambourine bien trop fort dans son maigre cœur en miette. les parcelles s'éparpillent, s'égarent en chemin. et ça fait couler encore plus de larmes, ça noue encore plus la gorge. comme une balle tirée en plein cœur, qu'on ne peut pas retirer, sinon on meurt. t'es pathétique, leo. tu sais pas correctement te comporter. la seule occasion que t'aies jamais eu, tu l'as ruinée. parce que quand tu fais un pas avec ta putain de paire de talons trop coûteux, tu renverses tout. tu détruis des vies, tu tues sans même t'en rendre compte. c'est triste à voir, leo.
elle le sent encore contre elle, elle voudrait le serrer à jamais, sentir sur sa peau un souffle trop chaud. qui contrasterait avec le froid, parce que c'est ça qui est beau. la chaleur. l'envie. la passion. mais rien de tout ça ne peut recommencer, pas encore une fois. "j'suis désolée, iz. j'suis désolée de t'avoir trop aimé. j'suis désolée d'me tenir comme ça devant toi. j'arrive pas. mais putain, c'était pas prévu, iz. pardonne-moi."
qu'est-ce qu'elle peut dire d'autre ? elle peut pas, elle y parvient pas. les mots, les émotions, ne veulent pas. leo enfonce ses ongles dans ses paumes, pour se retenir d'exploser. elle passe des mains dans ses cheveux bien trop souvent, pour avoir l'air de s'occuper. elle avance d'un pas, puis recule, parce qu'elle arrive pas à tenir en place. elle essaie d'exister un peu, pour de vrai. pour changer.
leo, elle a envie de dire qu'elle s'en fou, qu'au fond, elle peut trouver mieux. que si elle le veut, elle peut s'envoler, ressusciter des ailes trop abîmées. enfermer ses sentiments trop forts, et jeter la clé loin dans le néant. éteindre une humanité trop envahissante, effacer des détails trop douloureux. mais iz, bordel iz, il est là, et il veut pas partir. il a une place dans son cœur, dans son esprit, dans son corps entier. iz, c'est une putain de maladie qui arrache les poumons, qui tue à petits feux. qui s'agrippe de toutes ses forces, qui veut pas lâcher. aucun traitement, aucun médicament. il reste, et sera toujours présent. cancer incurable, iz. à jamais cloîtré dans chacun des organes, dans chaque bouffée d'air respirée. iz partout, iz nulle part. qu'on finit toujours par retrouver.

Spoiler:

Quand il voit les larmes de léonor s’écraser sur le bitume, izzy a envie de hurler, de hurler du plus profond de son âme, de frapper aussi. Mais frapper quoi ? Frapper qui ? Tout. Le monde entier, et puis la vie avec. Il a envie de tout faire péter izzy, de tout cramer, bruler, effacer… Oublier.
Il a envie d’entendre son rire qui résonne dans la chambre, quand ses yeux brillent dans les draps froissés.
Il a envie de tellement de chose izzy, et c’est comme une tornade à l’intérieur, un brouhaha permanant, une cacophonie insupportable des désirs qui se mêlent aux souvenirs, aux espoirs, aux regrets.
Alors izzy ne réfléchit pas et frappe son poing très (trop) fort sur le bitume. Ça vibre dans son coude, les jointures craque un peu, la chair est à vif. Il grimace, c’est douloureux.

Puis elle parle, des mots tristes. Vides.
"j'suis désolée, iz. j'suis désolée de t'avoir trop aimé. j'suis désolée d'me tenir comme ça devant toi. j'arrive pas. mais putain, c'était pas prévu, iz. pardonne-moi."
Et izzy se déteste encore un peu plus. Parce que c’est de sa faute tout ça. Parce que s’il avait su fermer sa gueule elle aurait pu tracer sa route. S’il avait su rester loin d’elle, elle aurait surement continué sa vie sans pleurer, sans vraiment y penser.
S’il ne l’avait pas rencontré, elle serait surement heureuse aujourd’hui. Peut-être assise à la terrasse d’un café avec ses copines, à rire de ce rire si particulier, innocent, vrai.
Mais on ne change pas le passé, mais si on le veut très fort. Alors izzy baisse les yeux sur ses basquets élimées, il n’ose plus croiser son regard à elle parce que s’il rencontre encore ses grands yeux pleins de larmes, il ne sait plus ce qu’il pourrait faire. Beaucoup. Trop.

Elle bouge trop léo, ses mains, ses pieds, elle bouge dans des bruits de vêtements froissés et de sanglots étouffés. Alors izzy prend son courage dans la gueule et ses couilles dans la main, puis lève les yeux vers la jolie blonde. Son visage est dur, il n’y a plus d’émotion, juste un vide, un vide-miroir, le miroir d’izzy, celui qu’il maîtrise si bien. Celui que personne n’a su percer.
« C’est pas toi léo. C’est moi. J’aurai juste jamais dû venir vers toi. C’était une erreur. Une connerie d’ado qui a peur de s’engager. Et regarde où ça nous a mené. »
Un foutu lâche, t’es rien qu’un foutu lâche izzy.
« J’étais jeune, con et pleins de foutre et d’hormones, j’savais pas ce que je faisais, désolé léo, j’ai merdé. Mais tu ferais mieux de pas rester, y a plus rien pour toi ici. Y a plus rien pour toi à mes côtés. Tu le sais. »
Et ces mots lui arrachent les lèvres, lui déboitent la mâchoire et réduisent son cœur en poussière glacée.  Mais ça vaut mieux pour elle. Ça vaut mieux pour tout le monde. Alors il tourne la tête izzy et tire une nouvelle fois sur sa cigarette.
Idiot.
Abruti.
Il regrette déjà ses mots izzy, il regrette sans savoir comment les ravaler.
Le combat du cœur et de la raison, celui de le réalité contre les illusions.
Arrête de rêver izzy, on est pas dans un disney, la princesse elle a pas besoin de chevalier, puis de toute façon t’es plus bon à rien iz, alors va chier.
Il lève un regard discret vers la jolie blonde, et son cœur manque de s’arracher.
Putain ça fait mal d’aimer.

Spoiler:

deux âmes face à face qui n'osent même plus se regarder. parce que quand elle regarde ses yeux sombres et timides, leo, elle y voit beaucoup trop de souvenirs passés, les bons comme les mauvais. le regard ne trompe pas, il trompe jamais.
elle veut retrouver l'étincelle qui a tout changé le jour où elle l'a vu pour la première fois, iz. une simple danse qui a tout changé, alors qu'elle était encore trop jeune, peut-être. une simple rencontre qui s'est révélée vitale, impensable et indispensable à la fois. un rapprochement enflammé, mené par l'interdit, pourtant si passionné. attirance inévitable, des aimants qui ne pouvaient que s'aimer sous la pression du danger. deux corps qui se découvrent pour la première fois. le corps de leo, pour la première fois, avec iz, qu'elle aimait.
il enfonce son poing fort dans le béton, le brun. ça fait prendre une grande inspiration rapide à leo, ça résonne dans sa tête et ça fait bam dans ses pensées. elle fixe les quelques gouttes de sang qui s'échappent de la plaie, et ça la rend triste, leo. trop triste. ça fait mal aussi, parce que la chair est à vif, comme leurs sentiments.
comment est-ce que vous en êtes arrivés là, putain ? c'est entièrement de ta faute, leo. t'avais qu'à pas jouer les princesse sauvage alors que tu le connaissais même pas. fallait pas le tenter, l'aguicher, le suivre, et l'aimer. t'as bien trop de regrets, leo, tu vas finir par exploser.
les larmes ne cessent de monter, et blondie, elle se force à les retenir, à se créer un barrage inutile qui n'arrête pas de se briser. façade de princesse enlevée, arrachée, disparue au moment où elle a vu iz sur le bitume alors qu'elle ne faisait que marcher, errer dans l'aube pour fixer quelques idées. le brun hausse finalement le regard, leo s'immobilise. à nouveau statue de marbre, poupée de porcelaine, elle retient son souffle, la bouche entrouverte et les paumes serrées. "c'est pas toi leo. c'est moi. j'aurais juste jamais dû venir vers toi. c'était une erreur. une connerie d'ado qui a peur de s'engager. et regarde où ça nous a mené." ça fait mal, bordel. ces mots, prononcés de sa propre bouche, modelés de son esprit, la heurtent de plein fouet. comme une seconde balle qu'on lui aurait tiré, parce qu'une, c'est apparemment pas assez. "j'étais jeune, con et plein de foutre et d'hormones, j'savais pas ce que je faisais, désolé leo, j'ai merdé. mais tu ferais mieux de pas rester, y'a plus rien pour toi ici. y'a plus rien pour toi à mes côtés. tu le sais." ça tambourine, ça bourdonne. ses paroles lui trouent le crâne, se préparent à s'encrer à jamais dans sa tête, dans sa vie. il la regarde, l'air froid et dérangeant. un masque, une façade. c'est pour qu'elle comprenne, qu'elle abandonne, qu'elle parte. elle a comprit, leo, qu'il ne veut plus d'elle, qui n'a plus le droit. plus d'envie, plus de passion. alors à quoi bon.
puis il dévie, leo aussi. elle lève ses émeraudes brisées vers le ciel, vers les nuages, ces bouts de coton flottant dans l'air. un semblant de beauté. elle se dit que ça doit être beaucoup mieux d'être là-haut, que ça doit être beaucoup mieux pour marla. elle doit les trouver pathétiques, elle. tous deux, à pas oser se regarder, à s'être embrassés, pour après prononcer des mots crus qui déchirent le thorax.
leo, elle voit même pas iz qui la regarde discrètement une nouvelle fois. elle veut plus, elle peut pas. elle peut pas souffrir encore comme ça. "dis pas ça, iz." ça s'arrache de ses lèvres, c'est spontané. elle veut pas le croire. parce que malgré toute cette souffrance, y'a ce putain d'espoir qui s'accroche désespérément. qui s'accroche à un fil, les pieds déjà dans le vide. mais ça suffit pas, ça suffit plus. parce que l'espoir, c'est les beaux moments du passé. et tout le reste, ce qui fait mal, ce qui pèse sur ses épaules, c'est iz, seulement iz. elle sait pas quoi faire, leo. "blâme-moi. c'est de ma faute, iz. déteste-moi autant que tu le veux. ça, t'as le droit. parce que j'me pardonnerai jamais moi, tu sais, iz. j'arriverai pas." puis elle pose enfin son regard sur lui et la fumée qui s'échappe lentement de ses lèvres qu'elle ne rêve que d'embrasser à nouveau. sans réelle raison valable. juste parce que y'a ce manque qui se fait ressentir. manque des années passées qu'elle veut combler, leo. "mais t'as raison. aurevoir, iz. tu me reverras plus. il vaut mieux pour nous." nous. notion trop oubliée, trop lointaine, qu'elle veut à la fois chasser et retrouver. nous, dernier mot qui s'échappe des cordes vocales, qui fait mal, trop mal.
timidement, elle recule, leo. quelques pas en arrière, puis elle se retourne enfin, se forçant à ne pas le regarder. ça lui déchire le cœur, ça creuse de l'amertume dans tout son corps. mais c'est comme ça, elle a plus le choix. tu fais pitié à regarder, leo.

Spoiler: