partie libre

Venez m'aimer.
Venez.
Viens dans ce papier blanc.
Avec moi.

Je te donne ma peau.
Viens.
Vite.

Dis-moi au revoir.
C'est tout.
Je ne sais plus rien de toi.

Je m'en vais avec les algues.
Viens avec moi.

(Marguerite Duras, C'est tout)


(jeudi 00:12)

Un jour papa a dit : je pars. dans un mois. Nouméa.
Min a dit : moi aussi.
Min est partie avec papa qui devait travailler sur la réserve naturelle de Nouméa. Il dit qu'il étudie la terre, la nature etc. Min n'a jamais retenu le vrai nom alors elle dit : géologue. Quand on lui demande.
Je crois qu'elle a aimé Nouméa. Aimé Nouméa comme on l'a aimée à Nouméa. Avec force.
Nouméa c'était les grands bras dans le lit au réveil, la chaleur du corps et la douceur de la peau. La peau, elle est devenue froide à Amsterdam, quand Min est revenue.
(Maman et Jo attendait à l'aéroport avec leurs masques sourires, ça faisait presque 5 ans quand même).
La peau, elle est devenue froide à Amsterdam, quand Min est revenue. Froide. Alors Min en a cherché d'autres, mais ils étaient tous aussi froids. Il paraît que c'est comme ça quand on aime pas vraiment, une chaleur froide qui se dissipe rapidement. Qui s'enfuit avec les caresses.
Alors pour l'instant on fait semblant. On voit les autres, on sourit, on embrasse Louis pour dire bonjour au revoir. On rentre, on met la musique très fort et on pleure des fois. Avec la musique par dessus pour ne pas alerter.
Puis on check les notifications tinder, 7 ou 8 messages auxquels on répondra plus tard salut ça va et toi.
Min essaie des corps, des caresses, n'est pas toujours convaincue, se perd dans d'autres bras pour un corps moment et ne donne plus de nouvelles.
Min veut Nouméa et sa chaleur.
Tout est resté là bas, on est rentrés vides, comme si on naissait à nouveau (pour maman et jo). On se cherche. On se recrée loin d'une deuxième vie.
On écrit pour ne pas oublier Nouméa.
Pour en garder un bout.